UNE CENSURE SUBTILE

Christian Bouchet

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La personnalité d’Otto Rahn m’a toujours intéressée et il était donc normal pour moi de faire l’achat de sa récente biographie parue chez Privat et œuvre d’un certain Mario Baudino. Comme je le fais toujours quand je prends en main un livre pour la première fois, j’ai commencé sa lecture par sa bibliographie.

Celle-ci n’a pas été sans me surprendre. En effet, si les deux romans mythiques de Rahn y figurent bien, ils sont cités dans des éditions introuvables depuis longtemps (une étant datée de 1934, l’autre de 1974). Or il existe de ces ouvrages une réédition récente publiée par les Editions Pardès. Mario Baudino l’ignore-t-il ? Non pas, puisqu’il la cite. Mais il ne fait pas cela dans sa bibliographie, juste dans une note de bas de page, au détour d’un chapitre, en précisant bien que ces livres figurent « au milieu d’un catalogue dont l’auteur ne partage pas du tout l’orientation idéologique ». En quelques mots, le mal est fait avec subtilité.

En réalité, ma surprise n’en fut pas une. En effet, on assiste de plus à une censure subtile dans les bibliographies qui en dit long sur l’état de domestication idéologique de nombre de chercheurs : soit des références sont totalement occultées, soit elles sont bien présentes mais disqualifiées par des notes qui mettent en doute la neutralité ou le sérieux des auteurs ou des éditeurs. L’exemple le plus pur de ce comportement étant La Foire aux illuminés de Pierre André Taguieff (1001 Nuits, 2005) où l’on peut trouver deux bibliographies : une où figurent les auteurs « cacher » et l’autre, précédée de quelques mots faisant fonction de mise en garde, où figurent tous ceux qui ne devraient pas avoir le droit d’écrire ou de publier. Ceci non pas à cause de la qualité de leurs travaux, mais parce qu’ils sont considérés comme développant une hostilité « de droite » vis-à-vis du système actuel (bien sur les plumitifs gauchos ou « sionards de droite » les plus médiocres figurent chez Taguieff dans la « bonne » biblio).

Gros lecteur, je constate que ce comportement est de plus en plus fréquent. Je l’ai encore retrouvé, il y a quelques jours, dans Le Néo-paganisme, une vision du monde en plein essor de Stéphane François (MCOR) où l’auteur – qui se présente comme « historien des idées » - fait précéder sa bibliographie de quelques lignes où il s’excuse d’y citer tant de méchants « néo-droitiers », ceux-ci ayant malheureusement été les seuls à écrire avec intelligence sur ce sujet…

Je discutais de cela, hier, avec un étudiant en histoire passionné par l’œuvre de Drieu La Rochelle. Il fut surpris de mon étonnement agacé devant ces procédés. Dans sa fac, me relata-t-il, si les œuvres politiques de Drieu figurent bien au fichier de la Bibliothèque universitaire, il est cependant impossible de les consulter, à moins d’avoir l’aval d’un enseignant en histoire et de justifier d’une recherche précise… Selon lui, cette censure non-dite s’étendrait à de nombreux autres auteurs mal-pensants et serait pratiquée dans nombre d’autres BU…

Tout cela est détestable et méprisable et en dit long sur la liberté de pensée qui règne dans notre pays.